Ces individualismes qui reposent sur des idéalisations et entravent la liberté de penser

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La notion d’individualisme a été au cœur d’une foule de débats depuis deux siècles1. Rejeton philosophique des controverses portant sur les démocraties naissantes, ses diverses interprétations l’ont rendue difficile à appréhender. Davantage qu’à sa définition, c’est à ses origines historiques et philosophiques que nous allons nous intéresser, avec l’objectif de montrer son incohérence foncière. Dans cette perspective, nous aurons recours, une fois de plus, au concept d’idéalisation. Nous conclurons sur les écueils que dressent les individualismes sur la route de la liberté de penser.

Polysémie du mot

Premiers emplois​

Le terme d’individualisme est forgé au début du XIXe siècle, dans les remous intellectuels de la Révolution française2. Il sert en première instance aux contrerévolutionnaires de tous bords pour dénoncer la primauté des intérêts individuels sur ceux des collectivités. 

En 1835, dans son étude de la démocratie américaine, Alexis de Tocqueville opère une distinction entre égoïsme et individualisme :

L’égoïsme est un amour passionné et exagéré de soi-même, qui porte l’homme à ne rien rapporter qu’à lui seul et à se préférer à tout.

L’individualisme est un sentiment réfléchi et paisible qui dispose chaque citoyen à s’isoler de la masse de ses semblables et à se retirer à l’écart avec sa famille et ses amis; de telle sorte que, après s’être ainsi créé une petite société à son usage, il abandonne volontiers la grande société à elle-même3.

La conception de Tocqueville, moins péjorative que celle des contrerévolutionnaires, demeure négative en dépeignant une attitude qui, malgré sa rationalité, participe de la dissolution sociale. Elle se démarque du libéralisme économique anglo-saxon qui perçoit la société comme composée d’individus dont les intérêts s’harmonisent naturellement au contact du marché. Aux États-Unis, l’individualisme est encore plus ancré dans les mœurs car la politique s’est construite localement pour, progressivement, se consolider au niveau d’un État fédéral4.

Une autre forme d’individualisme émerge en Allemagne dans le sillage du romantisme. Dans une veine souvent mythique, elle idéalise l’individu. Elle culmine dans les pensées de Max Stirner et de Friedrich Nietzsche pour se déployer ensuite dans différents types de nationalismes.

Trois significations principales se dégagent ainsi des premiers emplois du terme individualisme :

  1. ​L’attitude qui tend à privilégier l’intérêt individuel par rapport à l’intérêt collectif.
  2. L’idée qu’une société résulte de l’agrégation d’individus qui se coordonnent grâce à des moyens économiques (marché) et politiques (démocratie).
  3. L’idéalisation de l’individu qui devient un surhomme.

Individualisme et liberté de penser

À la fin du XIXe siècle, Émile Durkheim rapproche individualisme et liberté de pensée. Il explique que le phénomène correspondant n’est pas nouveau, que ses origines se perdent en remontant le cours de l’histoire :

L’individualisme, la libre pensée ne datent ni de nos jours, ni de 1789, ni de la réforme, ni de la scolastique, ni de la chute du Polythéisme gréco-latin ou des théocraties orientales. C’est un phénomène qui ne commence nulle part, mais qui se développe, sans s’arrêter, tout le long de l’histoire. Assurément, ce développement n’est pas rectiligne. […] la conscience commune […] consiste de plus en plus en des manières de penser et de sentir très générales et très indéterminées, qui laissent la place libre à une multitude croissante de dissidences individuelles. […] A mesure que toutes les autres croyances et toutes les autres pratiques prennent un caractère de moins en moins religieux, l’individu devient l’objet d’une sorte de religion5.

Tandis que Max Weber perçoit dans la rationalisation des sociétés occidentales une diminution de religiosité6, Émile Durkheim voit dans l’individualisme une métamorphose du sacré qui se transfère de la totalité (la société dans son ensemble, qui correspond à Dieu) à ses composants (les individus).

Quelle que soit la part respective de la rationalisation et du religieux dans l’émergence de l’individualisme, peut-on affirmer que celui-ci a marché main dans la main, d’un point de vue historique, avec la liberté de penser ?

Des idéalisations aux individualismes

Le concept d’idéalisation, que je développe depuis 2020, me semble philosophiquement pertinent car, contrairement à celui de volonté, il marque la part psychologique et contingente des pensées produites. Il permet en outre d’englober des aspects scientifiques, éthiques, esthétiques, religieux, politiques, économiques, etc. 

Il convient ainsi de différencier les idéalisations scientifiques7 des idéalisations éthiques : les premières contribuent à décrire de manière exacte la réalité quand les secondes constituent davantage des buts à atteindre et sont donc souvent éloignées de la réalité. De plus, quantité d’idéalisations d’ordre esthétique et économique ne relèvent ni de la science ni de l’éthique. Ces idéalisations orientent les comportements autant et parfois davantage que ne le font les morales.

Idéalisations anciennes

Les croyances religieuses antiques, nous l’avons souligné ailleurs8, manifestent des formes d’idéalisation de la puissance humaine. S’agissant de l’individu, relevons plus particulièrement les actes héroïques dont les Grecs entretiennent avec ferveur la mémoire, une mémoire qui se perpétue grâce à la collectivité. Comme l’explique Jean-Pierre Vernant9, la gloire impérissable des héros permet, en quelque sorte, de dépasser la mort. « Dans une culture comme celle de la Grèce archaïque, où chacun existe en fonction d’autrui, sous le regard et par les yeux d’autrui, où les assises d’une personne sont d’autant mieux établies que s’étend plus loin sa réputation, la vraie mort est l’oubli, le silence, l’obscure indignité, l’absence de renom10. »

C’est de la mémoire que surgissent les idées éternelles de Platon dans le ​Ménon. L’âme se ressouvient de connaissances qu’elle a oubliées en plongeant dans le corps. La valorisation philosophique grecque de la connaissance manifeste métaphoriquement que la puissance issue des sciences commence à prendre le pas sur la force athlétique des guerriers.

Les premiers chrétiens, pour leur part, accomplissent des miracles plutôt que des exploits, ils valorisent les sentiments davantage que la raison. Contrairement aux dieux grecs qui se sont retirés sur l’Olympe et ne s’intéressent plus guère aux vicissitudes de la vie humaine, le Dieu des chrétiens demeure auprès de sa création. Il connaît les pensées et les actes de chaque individu et s’en sert pour accorder ou non le salut. Libre de suivre ou de s’écarter des règles morales, le chrétien doit surveiller ses pensées et ses actes tout au long de sa vie. Il développe ainsi une intériorité qui a probablement participé historiquement du développement de l’individualisme11. Ce dernier provient ainsi en partie d’une idéalisation religieuse, de la capacité divine à connaître l’âme de chaque individu.

​Idéalisations modernes de la liberté

La liberté individuelle ne coulait pas de source pendant l’Antiquité, les peuples du pourtour méditerranéen croyant leur existence déterminée par les dieux. Les Grecs chérissaient l’indépendance de leurs cités, mais ils ne se souciaient guère de la liberté de leurs citoyens qui appartenaient, corps et âme, à leur cité12. La liberté individuelle s’est profilée comme une capacité humaine d’agir indépendamment du destin à partir d’Épicure, puis à partir d’Augustin d’Hippone qui a mis en relief le libre arbitre13. Ce dernier consistait alors en une faculté d’accomplir le mal, non le bien. La liberté individuelle, en tant que possibilité d’agir indépendamment du destin ou de la providence, n’était donc pas valorisée au cours de l’Antiquité. Elle ne l’a pas davantage été durant le Moyen Âge.

Le changement de regard sur la liberté s’opère progressivement à partir du XVIe siècle. Nous avons rappelé14 combien l’expansion de la liberté de pensée, qui se produit du XVIe au XVIIIe siècle, s’appuie sur un accroissement des connaissances, des techniques et des sciences. Celles-ci favorisent les remises en question, les critiques et la formulation de nouvelles théories. Les interrogations sont en particulier liées au développement de techniques qui facilitent les expérimentations et les découvertes, aussi bien géographiques que scientifiques. Les grandes explorations du monde sont l’occasion d’observer la diversité des cultures et de les comparer entre elles. Ainsi, l’expansion des connaissances se fait en grande partie grâce à des pratiques et à des méthodes qui initient les démarches scientifiques modernes. Le sujet moderne est celui qui expérimente par lui-même. L’intuition cartésienne du ​cogito​ exprime cette tendance de façon abstraite et montre simultanément combien une expérimentation isolée peut induire en erreur15 et favoriser des idéalisations.

Cette effervescence technique et épistémologique accompagne le développement du commerce et de l’industrie et, par voie de conséquence, celui de la bourgeoisie. Jusqu’au XVIIIe siècle, celle-ci vit dans l’ombre de l’aristocratie, le travail étant culturellement dévalué16, perçu le plus souvent comme une damnation divine17. Les mentalités évoluent cependant petit à petit vis-à-vis de l’économie, d’abord pour des motifs de philosophie politique avec l’émergence, au XVIe siècle, d’une raison d’État dont toutes les définitions ont « leur source dans la reconnaissance préliminaire que le bien et le bonheur de l’État, son intérêt, doivent être considérés comme le but de toute action politique. Dans cette acception, l’intérêt renvoie à une forme de calculabilité rationnelle18 ».

La notion d’intérêt renvoie également à l’économie19. À partir du XVIe siècle, la question de l’enrichissement de l’État, en vue de sa puissance, devient un thème majeur de réflexion20, corrélé à l’émancipation du politique vis-à-vis du religieux. Souveraineté et richesse de l’État vont de pair, la seconde étayant la première. Ainsi, Jean Bodin soutient dans ​Les six livres de la République​ que les « finances sont les nerfs de la République21 ». Selon lui, les premières sources de richesses sont la terre, la guerre, la famille et les alliés. Le commerce arrive en cinquième et sixième positions, que le Prince exerce directement ce type d’activité ou qu’il en tire profit via des taxes.

L’économie gagne ses lettres de noblesse grâce à sa contribution politique, mais aussi grâce à une légitimation morale de l’intérêt, qui a été remarquablement décrite par Albert Hirschman dans ​Les passions et les intérêts22 : la poursuite de l’intérêt individuel, économique ou non, se justifie par la tempérance des mœurs qu’elle favorise. En outre, la coordination des intérêts se trouve facilitée par le marché, perçu par Adam Smith comme une sorte de providence divine23. Au XVIIIe siècle, le commerce devient ainsi facteur d’enrichissement et de pacification des relations internationales pour des philosophes comme Montesquieu ou Hume24.

On ne saurait comprendre comment la liberté a fait l’objet d’idéalisations sans avoir à l’esprit les bouleversements intellectuels, techniques, économiques et politiques qui sont intervenus du XVIe au XVIIIe siècle25. La rupture qui s’est opérée ne fut pas celle d’un droit naturel26 qui existait depuis l’Antiquité et qui a été débattu abondamment dès le XIe siècle. Elle fut d’abord une révolution des connaissances et des techniques, qui a pu donner l’impression, d’une part, qu’une maîtrise de la nature et de ses richesses était à portée de main et, d’autre part, qu’une harmonisation des mœurs et des échanges économiques nous tendait les bras.

Idéalisations contemporaines

Si j’ai consacré autant de temps à l’étude de la liberté et que j’y reviens sans cesse, c’est parce qu’elle est la valeur première des sociétés occidentales, devant l’égalité, les inégalités structurelles et les sondages d’opinion sur les préoccupations des citoyens abondant en ce sens. Les idéalisations de la liberté et de la puissance qui lui est associée sont, de mon point de vue, à la base des maux qui gangrènent les relations humaines depuis des millénaires. Elles sous-tendent une multitude d’idéalisations car on convoite des choses dans la mesure où l’on détient une légitimité ou un droit à y aspirer.

Avec l’instauration progressive de démocraties, à partir de la fin du XVIIIe siècle, l’idéal de richesse qui était d’abord l’apanage de l’aristocratie, puis de la bourgeoisie, s’est démocratisé. Comme je l’ai déjà signalé27, l’ambition de croissance n’a pas connu de frontières politiques, elle a été commune à tous les partis au cours du XIXe et du XXe  siècle. La quête de richesses n’a pas perverti les morales existantes, elle a intégré les morales laïques au travers de la liberté. Ajoutons que les discussions éthiques actuelles reviennent régulièrement à une question de droits individuels davantage qu’à une question de vivre ensemble.

La primauté sociale de la liberté, en tant que valeur, complexifie la problématique de l’individualisme. Comment peut-on qualifier d’individualiste un comportement qui vise l’enrichissement alors même que ce dernier fait partie intégrante de l’éthique commune ? Il n’est pas question ici de douter des bienfaits générés par les progrès technologiques et économiques, seulement de critiquer l’excès d’accumulation, financière, foncière ou matérielle, que l’on ne parvient pas à chiffrer et à délimiter28. On peut dire, d’une certaine manière, que les idéalisations de la liberté ont sappé les fondements de la philosophie qui, dès ses prémices antiques, visait la mesure. Elles nous ont conduits à une ère de démesure qui s’est traduite concrètement dans les ambitions débordantes des dirigeants politiques et économiques, ambitions qui ont en partie mené aux colonisations du XIXe siècle et aux guerres mondiales du XXe siècle. La démesure continue d’animer les « responsables », dont la maîtrise a été rognée par la complexité croissante des sociétés. Elle a aussi pour conséquence le réchauffement climatique.

Le goût pour la liberté, aussi intense soit-il culturellement, n’étanche pas la soif de reconnaissance. À l’instar de la quête de richesses, la recherche de reconnaissance publique s’est démocratisée, surtout depuis l’apparition d’Internet. Produit du désir de se distinguer, à la manière des héros antiques qui voulaient laisser une empreinte indélébile dans la mémoire collective, les réseaux sociaux ont braqué sur elle leurs projecteurs. Elle manifeste dans les imaginaires contemporains la persistance d’une pensée mythique qui se retrouve dans quantité de fictions. Dans cette perspective, l’individualisme ne consiste pas à s’isoler des autres comme l’avançait Tocqueville mais, au contraire, à rechercher leur attention et leur assentiment. Il aiguise une compétition sociale indéfinie dans laquelle chacun s’efforce de se démarquer pour exister socialement.

Ainsi, nombre d’idéalisations anciennes coexistent avec les idéalisations modernes. Elles alimentent différentes formes d’individualismes, depuis le retrait de type aristocratique dans une maison bourgeoise jusqu’à la poursuite de reconnaissance publique sur les réseaux sociaux. Parmi les idéalisations anciennes, revenons aux religions et à leurs morales dont la cohabitation au sein d’un même pays catalyse régulièrement des frictions. Dès lors que l’empathie s’éprouve de manière privilégiée vis-à-vis de personnes avec lesquelles nous avons des points communs29, la diversité des éthiques n’a-t-elle pas tendance à favoriser des comportements que l’on qualifie d’individualistes alors qu’ils reflètent une limite d’empathie ? L’indifférence vis-à-vis d’autrui manifeste alors simplement une absence d’empathie. Nos sociétés sont d’ailleurs tellement peuplées, les sollicitations tellement nombreuses, qu’elles peuvent aisément provoquer une saturation de l’empathie. Dans ces conditions, la notion d’individualisme devient évanescente.

La liberté de penser à l’épreuve des individualismes

Lorsqu’on a montré combien les individualismes contemporains reposent sur des idéalisations, le concept d’individualisme se disloque. En effet, les idéalisations évoquées émanent de la société, elles n’ont pas été l’œuvre d’une personne en particulier, elles sont partagées, communes. C’est notamment pourquoi la notion d’individualisme, dès le départ et contrairement à celle d’égoïsme, est bancale : elle ne peut mener qu’à des paradoxes apparents, comme celui d’une avidité de reconnaissance au sein de sociétés dites individualistes.

Un individualisme conformiste

Un autre paradoxe majeur de l’individualisme est celui du conformisme, que chacun peut observer et qui a fait l’objet de multiples recherches en psychologie cognitive. Comme le rapporte Paul Bloom dans ​Psycho​ :

Il s’avère qu’une astuce efficace pour inciter les gens à faire quelque chose, comme voter ou recycler, est de leur dire que la plupart des autres personnes le font. Lorsqu’un Holiday Inn en Arizona voulait que ses clients réutilisent leurs serviettes, ils ont découvert que la méthode la plus efficace consistait à laisser une carte dans leurs chambres, indiquant que « soixante-quinze pour cent de nos clients utilisent leurs serviettes plus d’une fois30« .

​Dans une expérience devenue célèbre31, le psychologue Solomon Asch a demandé aux participants de réaliser un exercice de perception. En réalité, tous les participants sauf un – le sujet de l’expérience – étaient des acteurs suivant les consignes de l’expérimentateur. L’intérêt de l’exercice résidait donc dans les réponses du sujet. À chaque participant étaient montrées successivement les deux cartes suivantes :

​Sur la première carte figurait une ligne, sur la seconde trois lignes dont une qui correspondait en longueur à la ligne de la première carte. Il était ensuite demandé à chaque participant d’indiquer quelle ligne, sur la seconde carte, correspondait en longueur à la ligne de la première carte. Dans certains exercices, les acteurs répondaient juste, dans d’autres non, mais ils donnaient tous la même réponse. Au total, 74% des sujets ont donné au moins une mauvaise réponse suite à l’influence trompeuse des acteurs.

Une autre expérience, bien plus célèbre encore en termes de conformisme, a été celle de Stanley Milgram32. Quoique très controversée, elle a montré une inclination pour obéir à l’autorité, inclination qui fait écho aux réflexions d’Hannah Arendt sur le totalitarisme :

Pour les impitoyables machines de domination et d’extermination, les masses de philistins bien organisées constituaient un matériau bien meilleur et capable de crimes bien plus grands que les criminels soi-disant professionnels, pourvu que ces crimes fussent soigneusement organisés et eussent l’apparence de besognes de routine33.

La liberté de penser… des absurdités

En plus de la quête d’idéalisations, du désir de reconnaissance et du conformisme ambiant, les individualismes contemporains sont aiguillés par la spécialisation et par l’informatisation. La première complexifie la possibilité d’étendre ses connaissances et, par conséquent, de développer une autonomie intellectuelle. La seconde, bien qu’elle facilite l’accès au savoir et paraisse constituer un antidote à la spécialisation, induit le risque d’externaliser excessivement ce savoir, de déléguer sa raison à l’intelligence artificielle ou de se laisser emporter par des courants de pensées fantaisistes, en particulier sur les réseaux sociaux.

Ainsi, entre aveuglement, lié aux aspirations sociales, et étroitesse d’esprit, favorisée par la spécialisation et par l’informatisation, les individualismes contemporains entravent la liberté de penser. Dans un tel contexte, celle-ci n’est plus une possibilité d’accorder ses opinions avec les sciences et avec la réalité, elle se réduit à un refus de toute contrainte réflexive, en particulier à un droit de déguiser des absurdités en vérités ou de cultiver des pensées contredisant les faits.

Poursuivre la réflexion : L’évolution corrélée de la vie privée, de la liberté de penser et des idéalisations

Notes

1. Voir notamment : https://damiengimenez.fr/du-holisme-a-lindividualisme-methodologique-un-eventail-de-rationalites/

2. https://www.britannica.com/topic/individualism

3. Alexis de Tocqueville, De la démocratie en Amérique II, UQAC, p. 97.

4. Ibid.

5. Émile Durkheim, « L’individualisme et les intellectuels », Revue bleue, 4e série, t. X, 1898, pp. 7-13.

6. https://damiengimenez.fr/la-rationalite-selon-max-weber-raison-desenchantee-et-ideal-sociologique

7. https://damiengimenez.fr/synthese-conceptuelle-des-modelisations-en-economie-et-en-sociologie-et-plus-largement-en-sciences/#Idealisations_categories

8. https://damiengimenez.fr/lidealisation-dans-lhistoire/

9. Jean-Pierre Vernant, L’individu, la mort, l’amour. Soi-même et l’autre en Grèce ancienne, Gallimard, 1989, p. 52-53.

10. ​Ibid.

11. ​Ibid., ​p. 231.

12. On peut citer l’exemple de Socrate qui a préféfé boire la ciguë plutôt que de s’exiler.

13. Damien Gimenez, ​La question de la liberté​, L’Harmattan, 2018, p. 28 ​sq.

14. https://damiengimenez.fr/progres-et-limites-de-la-liberte-de-penser-en-europe-du-xvie-au-xviiie-siecle/

15. Les critiques du ​cogito ​ont été immédiates et on a reproché par la suite à Descartes d’avoir favorisé le scepticisme.

16. Cette dévaluation se retrouvait dans l’ensemble des cultures gréco-romaines.

17. Expulsion d’Adam et Ève du paradis originel dans le livre de la ​Genèse​. Voir à ce sujet, par exemple, Dominique Méda, Le travail, PUF, 2018. La perception négative dominait malgré l’existence de passages de saint Paul valorisant le travail.

18. Domenico Taranto, « Le discours de la raison d’État », in Alain Caillé, Christian Lazzeri, Michel Senellart (dir.), Histoire raisonnée de la philosophie morale et politique, La Découverte, 2011.

19. Depuis le XIIIe siècle : https://www.littre.org/definition/int%C3%A9r%C3%AAt

20. Cf. traités d’économie politique du XVIe au XVIIIe siècle, en particulier les deux grands courants de pensée économique que furent le mercantilisme et la physiocratie.

21. Jean Bodin, Les six livres de la République, Librairie générale française, 1993, p. 498.

22. Albert O. Hirschman, Les passions et les intérêts, PUF, 2020.

23. Adam Smith, ​Théorie des sentiments moraux​, PUF, 2003, p. 257 ​sq.

24. Pour Hume, voir en particulier cet article :
https://damiengimenez.fr/la-philosophie-de-david-hume-aux-sources-de-la-rationalite-economique-classique/

25. Comment de tels bouleversements pourraient-ils être réduits à l’une de leurs facettes (intellectuelle, matérielle…) alors que, clairement, ces différentes facettes ont interagi les unes avec les autres ?

26. Le droit naturel remonte à la Grèce ancienne. Platon (​La République​, 369b) et Lucrèce (​De Rerum Natura​, V) proposent des versions que l’on peut qualifier d’individualistes de la formation des sociétés.

27. https://damiengimenez.fr/wpdgi_instant/voulons-nous-vivre-en-paix/

28. Par exemple, les discussions sur les salaires des grands patrons sont systématiques, mais rien ne se produit à cause de la concurrence internationale, concurrence qui est issue de la quête mondialisée de richesses.

29. https://damiengimenez.fr/la-projection-obstacle-majeur-a-la-distanciation/

30. Paul Bloom, ​Psych​, HarperCollins, 2023, chapter 11.

31. https://en.wikipedia.org/wiki/Asch_conformity_experiments

32. https://en.wikipedia.org/wiki/Milgram_experiment

33. Hanah Arendt, Le système totalitaire Les origines du totalitarisme, Volume 3, Seuil, 2005, p. 87.


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