
L’élection de Donald Trump pour la seconde fois à la tête de la première puissance mondiale manifeste que la tendance autoritaire dans le monde n’est pas un aléa conjoncturel qui se résorbera à l’aide d’une poignée de réformes. Cette tendance traduit un aveuglement sans frontières, miroir du désir de renforcer ou de redessiner celles-ci.
Le magnat de l’immobilier peut bien ériger des barrières économiques et migratoires, il ne fera jamais que tenter vainement d’isoler les États-Unis d’une réalité à laquelle ils n’échapperont pas, celle d’un monde orienté par les échanges économiques et par sa concurrence afférente, un monde qui s’informatise et dans lequel les États-Unis constituent une puissance parmi d’autres.
Que trois des hommes les plus fortunés du monde (E. Musk, J. Bezos, M. Zuckerberg) s’affichent comme les vassaux de D. Trump et que ces hommes dirigent des entreprises de haute technologie, cela exprime combien des entrepreneurs peuvent se soumettre à leurs idéalisations de maîtrise. Ces idéalisations sont compréhensibles dans la mesure où chacun d’eux a réussi à construire une organisation mondiale qui influence les jeux économiques et politiques. Mais aussi vastes et opulentes puissent être ces sociétés, elles n’en demeurent pas moins mortelles, à l’instar des civilisations plongées dans la concurrence pour des ressources en quantité limitée.
N’est-ce pas en partie pour éloigner vainement une compétition qui risque de saper leur domination que de grands entrepreneurs soutiennent des politiques autoritaires ? La concurrence structurelle de l’économie de marché et des pays entre eux, conjuguée à l’informatisation et aux inégalités planétaires, engendre une forme de chaos social en lieu et place de l’harmonie imaginée par Adam Smith. L’autoritarisme ambiant constitue une tentative illusoire de conserver un sentiment de maîtrise au sein de ce chaos, d’entretenir l’idéal d’une domination occidentale qui se fissure progressivement.
En ce XXIe siècle, une fois de plus, nous n’avons guère le choix, politiquement et économiquement, qu’entre la compétition et la domination.